La verbalisation d’un timbre, un acte de métacommunication

Par Agnès Le Guernic, T.S.T.A.E.

J’ai analysé un échange avec verbalisation de timbre et j’ai compris pourquoi il posait souvent problème. Ce type d’échange est en effet une transaction à réponse croisée, à quatre titres.

Regardons le stimulus : il part de n’importe quel état du moi de l’émetteur, mais il touche l’Enfant du récepteur qui a un ressenti désagréable.

Si le récepteur décide de verbaliser ce ressenti pour rétablir un lien positif avec l’émetteur, il le fait forcément de manière différée. Le décalage dans le temps , même minime crée la surprise, l’émetteur n’ayant pas forcément conscience de ce qu’il a dit et de l’effet produit. Celui qui rend le timbre se montre actif et reprend l’initiative.

  • La verbalisation du timbre par le récepteur du stimulus se fait depuis l’Adulte. L’Adulte est en contact avec l’Enfant, mais le message est caractéristique de l’Adulte : « Quand tu as dit telle chose ou fait tel geste, je me suis senti dévalorisé et en colère, ou triste ou j’ai eu peur etc. ». Il y a changement d’état du moi ; c’est donc bien une réponse croisée qui vise l’Adulte de l’autre et tente d’établir une relation égale. Elle crée aussi la surprise.
  • Enfin, le sujet est changé : on passe du contenu à la relation. Effet supplémentaire de surprise.
  • La verbalisation d’un timbre informe l’autre que ce qu’il a dit ou fait a été reçu autrement que ce qu’il croyait. C’est donc une confrontation.

Si celui qui verbalise son ressenti désagréable et rend un timbre se maintient dans l’OKness, sa réponse est simple. Elle contient un niveau de message. Nous avons vu que même dans ce cas, celui à qui est adressée la réponse est surpris, dérouté et un peu déstabilisé.

Si en revanche son Adulte est contaminé, il peut y avoir un double fond qui se manifeste au niveau non verbal. Ce double fond va alimenter un ressenti négatif possible si bien qu’en rendant un timbre on aboutit parfois à ce qu’un autre soit collé.

Informer l’autre de son ressenti négatif suite à un stimulus perçu comme source de colère ou de peur ou de tristesse pour soi est une ébauche de métacommunication. Si elle se poursuit, la relation est approfondie et le lien renforcé. C’est pourquoi il vaut la peine de rendre les timbres au fur et à mesure aux personnes qu’on apprécie. C’est en même temps un test de la qualité d’une relation.

Merci à Jean-Pierre Noé d’avoir ainsi stimulé notre réflexion !

Conscience politique et AT

Auteur : Agnès LE GUERNIC – TSTA éducation

Le terme de « conscience politique » implique une conscience de la société où l’on vit, de la manière dont le pouvoir y est organisé et exercé et une lecture de cette réalité. Elle signifie aussi conscience et connaissance de ses valeurs et de ses motivations et capacité à s’investir dans une cause estimée « juste ». Elle suppose une position par rapport aux autres et au monde.

Les références au politique sont rares dans la littérature transactionnaliste. J’ai trouvé deux auteurs ayant une réflexion plus poussée sur le pouvoir.

Le premier est Claude Steiner. Avec son ouvrage L’autre face du pouvoir , il est au cœur du sujet puisque le politique concerne l’organisation et l’exercice du pouvoir dans une société organisée. Il explique son cheminement par rapport au pouvoir et ses engagements militants personnels dans le mouvement féministe.

Alan Jacobs nous a apporté aussi une réflexion puissante sur le pouvoir autocratique et sur le fonctionnement des systèmes totalitaires. Son article nous met en garde contre ceux qui prétendent savoir comment changer le monde.

Pour traiter le sujet de la conscience politique, j’ai choisi de m’intéresser à la manière dont se construisent les convictions politiques et se décident les engagements en politique. J’utiliserai pour cela la notion d’états du moi et celle de positions de vie tripartites.

I –Les états du moi :

A – La conscience du contenu de son état du moi Parent et de ses héritages :

L’état du moi Parent d’une personne contient les trois états du moi introjectés de ses figures parentales, ce qui revient à dire que ses valeurs et ses modèles sont formés de trois séries d’éléments :

  • Les opinions exprimées par ces personnes sur les devoirs de chacun vis à vis de sa famille, de son pays, sur le rôle de la politique, la nature du pouvoir, la nécessité ou non de servir et la manière de le faire, la valeur du savoir et bien d’autres choses encore, transmises par les générations antérieures et qui constituent sa tradition familiale.
  • Les comportements de ces personnes au jour le jour : est-ce qu’elles exerçaient leur pouvoir de voter, est-ce qu’elles participaient aux activités citoyennes ? est-ce qu’elles manifestaient dans la rue pour une cause, comment elles intervenaient en cas de faute de leur enfant, pour le soutenir envers et contre tout ou pour lui apprendre à se conduire mieux ?
  • Ce qu’elles montraient de leur ressenti : excitation, emportement, envie, soumission à la fatalité, ressentiment, enthousiasme .

Notre système de valeur est influencé par cette origine multiple. Nous avons pris certains éléments présents dans les valeurs de notre lignée et rejeté certains autres et nous avons choisi d’autres modèles fournis par l’école, l’église, les lectures personnelles . On comprend qu’à l’intérieur du Parent, oppositions et contradictions puissent être nombreuses, soit parce que les figures parentales étaient peu congruentes et ne faisaient pas ce qu’elles préconisaient, soit par l’opposition entre l’héritage du père et celui de la mère ou de la famille et de l’école. Ainsi pour ce qui concerne la juste répartition du pouvoir entre un homme et une femme dans la famille ou dans la cité, les convictions varient beaucoup. Je vous laisse imaginer les possibilités pour les élèves qui étudient dans nos établissements : ils sont issus d’une immigration ancienne ou récente, enfants de couples mixtes ou non, de famille traditionnelle ou recomposée, de milieux sociaux et culturels différents . Ils doivent s’insérer dans une société où l’égalité des hommes et des femmes est inscrite dans la loi, mais pas toujours dans les pratiques.

B – La conscience des motivations enracinées dans l’état du moi Enfant et l’influence des expériences anciennes :

C’est dans l’Enfant que se trouvent les motivations pour agir. C’est dans les indignations de la petite personne que se nichent les sources de nos engagements d’adultes. Posez-vous la question : Pour quelle cause, suis-je prêt(e) à descendre dans la rue ? La réponse indique souvent le souvenir d’une injustice à réparer, d’une humiliation à corriger. Quand nous étions petits, quelque chose s’est produit qui nous a paru « injuste », un comportement d’adulte a lésé quelqu’un que nous aimions ou nous a blessé et nous avons décidé : « Quand je serai grand, je ne laisserai pas faire ça » , ou « Je m’occuperai des enfants ou des malheureux » , ou « Je n’oublierai pas ce que je ressens aujourd’hui . » Beaucoup de choix de métiers reposent sur ce type de décision. Beaucoup d’engagements militants aussi.

Le sentiment d’appartenance ancré dans l’état du moi Enfant, est aussi quelque chose de fort. Je me souviens d’un antillais qui disait avec force : « Je suis maître dans mon île ! » alors même qu’il était réputé « départementaliste », c’est à dire favorable au statut de département français de son île.

La conscience politique et la lecture de la réalité :

Elle implique des connaissances, des grilles d’analyse du réel, un accès au monde des idées. Elles sont historiques, économiques, juridiques. Notre formation intellectuelle va influencer nos choix dans l’ici et maintenant.

C – La prise de décision :

L’adulte qui a une conscience politique ne se contente pas de parler. Il veut agir. Il ne se limite pas à la connaissance de ce qui se passe autour de lui. L’engagement donne du sens à sa vie, quel que soit cet engagement. Ces choix peuvent être individuels ou collectifs. Quand ils se font en conscience, ils s’appuient sur le sentiment de responsabilité par rapport à ce qui se passe dans le monde, se nourrissent de l’énergie de l’Enfant et se prennent dans l’état du moi Adulte. Ils diffèrent d’une personne à l’autre parce que les influences sont différentes. Mais quand la personne descend dans la rue pour protester, elle sait pourquoi elle le fait.

II – Les positions de vie tripartites et les modalités de nos engagements :

C’est l’autre piste que nous fournit Eric Berne dans « Que dites-vous après avoir dit « Bonjour » ? Elles nous permettent d’analyser les positions idéologiques de chacun. Elles sont au nombre de huit.

  • Moi +, Vous +, Eux + : C’est la position démocratique, une manière d’idéal qui se résumerait dans la formule : « Personne ne doit rester sur le bord du chemin ! »
  • Moi +, Vous +, Eux – : C’est la position du préjugé et de l’esprit de corps :« Eux, qu’est-ce qu’on a à faire de leur sort ? » Peu importe la misère là-bas si on a la prospérité.
  • Moi +, Vous -, Eux + : C’est la position de l’agitateur mécontent et des missionnaires de toutes sortes. L’argument : « Vous, vous n’êtes pas des gens bien, par rapport aux autres là-bas qui sont des vrais héros. (Ailleurs, c’est mieux !)
  • Moi +, Vous -, Eux – : C’est la position arrogante par excellence, l’argument étant : « Vous n’avez tous qu’à faire comme moi, vous réussirez ».
  • Moi -, Vous +, Eux + : la position neurasthénique, celle du saint ou du masochiste qui se punit lui-même. « Il n’y a rien à tirer d’un africain, d’une femme, d’un arabe, d’un clochard comme moi etc. ! »
  • Moi -, Vous +, Eux – : la position servile de ceux qui vivent de pourboires sans véritable nécessité. Je me suis bien abaissé et vous m’avez récompensé. Quant aux autres, grand bien leur fasse ! Chacun essaie de gagner son biftèque comme il peut. Tant pis pour ceux qui n’y arrivent pas !
  • Moi -, Vous -, Eux + : position d’envie servile. « Ils nous détestent parce que nous ne sommes pas assez. ( riches, connus, savants, bien habillés) pour eux ! »
  • Moi -, Vous -, Eux – : position pessimiste des cyniques. Personne ne vaut rien et rien ne vaut la peine ».

Berne propose aussi les positions tripartites incertaines. J’ai retenu les suivantes :

  • Moi +, Vous ?, Eux – : qu’il explicite comme une position aristocratique de classe « La plupart des gens ne valent rien, mais en ce qui vous concerne, j’attends que vous me montriez vos lettres de créance »
  • Moi +, Vous +, Eux ? : position évangélisante : « Nous, nous sommes bien, mais eux, attendons qu’ils nous l’aient prouvé ! »

Les contenus importent moins que les positions respectives quand il s’agit du résultat. Ainsi Berne s’étonne qu’on se soit étonné de voir des zélés policiers nazis devenir de zélés policiers politiques en Allemagne de l’est. La position « Moi + (nazi), Lui – (traître), donc je le tue » reste la même quand on passe à « Moi + (communiste), Lui – (traître), donc je le tue ».

En revanche, derrière les plus et les moins, nous mettons des adjectifs qui concernent les motifs de valorisation ou de dévalorisation, les styles de vie. Les positions qui se fondent sur une seule opposition d’adjectifs, du type bon/mauvais, travailleur/paresseux, civilisé/sauvage, indiscipliné/discipliné, intelligent/idiot sont les plus dures à supporter. Ces simplifications sont particulièrement dangereuses pour la société. « Plus il entre d’adjectifs dans chaque + et dans chaque -, plus complexes et souples deviennent les positions, et plus il faut d’intelligence et de discernement pour s’en accommoder. Des ensembles d’adjectifs peuvent s’additionner pour aggraver, se soustraire pour atténuer, s’équilibrer par souci d’équité ». Un enfant que l’on qualifie de « sauvageon » peut être brutal ou avoir bon cœur, ce qui aggrave ou corrige le premier terme. La réalité n’est pas blanche ou noire, mais toujours à nuancer.

Conclusion :

En rappelant cette partie méconnue de la réflexion de Berne sur les positions de vie et en montrant comment on peut utiliser l’analyse de second ordre de l’état du moi Parent, j’ai voulu montrer comment l’analyse transactionnelle nous aide à penser non seulement les processus dynamiques qui nous conduisent vers des issues prévisibles, mais aussi les contenus idéologiques . Dans une période où des fanatiques veulent nous ramener aux oppositions binaires et nous interdire de penser le monde dans sa complexité, la relecture de Berne nous réserve donc de bonnes surprises.

L’orientation vers la « psychiatrie sociale » qu’il proposait implique une politique de prévention et de santé mentale. Berne se méfiait des utopies et se donnait des buts réalistes, comme celui de guérir les gens avec leur collaboration. Dans Que dites-vous après avoir dit « Bonjour » ? , il parle de « prendre sa carte de membre de l’espèce humaine », de se comporter en martien qui observe les terriens sans idées préconçues et il dit sa conviction que chacun peut améliorer, même modestement, la manière dont va le monde, en apprenant à dire « Bonjour ! » c’est à dire en s’intéressant aux autres. Il se limite à un type de projet personnel, mais il ouvre des pistes à ceux qui veulent pousser plus loin la réflexion sur l’engagement collectif .

Références Bibliographiques

Claude Steiner : L’autre face du pouvoir, Editions Desclée De Brouwer
Alan Jacobs : Le pouvoir autocratique, AAT N°46 p. 51 /TAJ 17.3 juillet 1987 pp 59-71 « Autocratic Power »
Eric Berne : Analyse transactionnelle et psychothérapie, pp199-202, Editions Payot
Eric Berne : Que dites-vous après avoir dit Bonjour ? , pp 80-83, Editions Tchou

 

L’AT, une philosophie, une théorie, une boîte à outils pour se comprendre et comprendre les autres

Auteur : Agnès Le Guernic, TSTA-E

Les origines et le postulat de base de l’A.T. : « tout le monde naît OK »

A l’origine, Eric Berne, un médecin psychiatre américain qui a voulu mettre « la psychiatrie et la psychanalyse à la portée de tous » (c’est le titre français de la traduction de son premier ouvrage « Mind in action »). Dans un contexte d’après guerre où tant d’hommes et de femmes se remettaient mal de ce qu’ils avaient dû subir, la cure analytique trop longue et trop chère était de peu d’aide pour le plus grand nombre. Eric Berne qui avait suivi une formation d’analyste a prôné des thérapies brèves, où l’on travaille en collaboration avec le patient ou le client, dans le cadre d’un contrat qui mobilise les deux parties.

Son postulat de base était que l’homme a à la naissance un potentiel de bonheur et une capacité à être en accord avec lui-même, les autres et la vie qui se modifie par la suite sous l’effet des circonstances de son histoire, mais qu’il peut retrouver par la suite, en particulier dans une démarche thérapeutique. Il disait dans son langage imagé : « Nous sommes tous nés princes et princesses ; les circonstances de la vie ont fait de nous des grenouilles et des crapauds, mais nous pouvons décider de redevenir princes et princesses, comme dans les contes ». L’A.T. est une philosophie optimiste.

Un langage simple, des schémas clairs :

Berne n’aimait pas les grands mots . Quand il entendait ses collaborateurs se lancer dans des analyses savantes à propos d’un cas, il disait : « Et pendant ce temps-là le client ne guérit pas ! ». Il prétendait qu’un enfant de huit ans devait pouvoir comprendre ce qu’on disait et il avait l’habitude de faire les réunions de synthèse à l’hôpital en présence des patients.

Si l’Analyse Transactionnelle a un langage simple, c’est pour mieux communiquer, parce que Berne voulait faire de la psychiatrie sociale et travailler avec les gens.

La théorie bernienne comprend quatre grands domaines :

  • l’analyse structurale de la personnalité humaine, modèle fondé sur trois systèmes de fonctions du Moi : l’état du moi Enfant, l’état du Moi Adulte et l’état du moi Parent. Ce modèle est une extension de la notion freudienne du moi.
  • l’analyse de la communication humaine et des transactions c’est à dire des échanges verbaux et non verbaux entre les personnes, (elle tire son nom du mot  » transactions »)
  • l’ analyse de la communication indirecte avec l’étude des jeux psychologiques c’est à dire des séquences prévisibles d’échanges qui tournent de manière désagréable ou destructrice , amenant des ruptures de communication, des escalades dans le conflit, des sentiments désagréables et l’impression que les problèmes sont insolubles,
  • l’analyse du scénario de vie, plan de vie psychologique influencé par les messages reçus dans l’enfance et celle des décisions prises par le petit enfant à un âge où il était dépendant des grandes personnes. Sans que nous en ayons eu conscience, notre « scénario de vie « s’est mis en place pour nous assurer la survie, la sécurité et l’approbation, au détriment de l’intimité, de l’expression et de la réalisation de nous-même.

La notion de base , c’est les états du Moi, le Moi étant la partie de la personne qui est consciente ou peut le devenir. Ce Moi est composé d’un état Parent, qui est l’héritage, ce que nous avons reçu comme messages parentaux qui forment notre système de valeurs, mais aussi nos préjugés, d’un état Adulte, la partie qui perçoit et analyse la réalité, l’instance de décision, et l’état du Moi Enfant partie qui est la trace de l’enfant que nous avons été et qui sera présent en nous jusqu’à notre dernier souffle. Chaque état est un ensemble cohérent de pensées , de sentiments et de comportements observables. Ces états du moi ne sont pas liés à l’âge : un enfant de trois ans ou un adolescent de de seize ans ont eux aussi trois états du moi.

Ces concepts sont représentés au moyen de schémas très faciles à utiliser et qui permettent de visualiser le Moi de chacun avec ses trois états, sous forme de trois cercles superposés et les échanges avec les autres (c’est à dire les transactions, avec mise en évidence des différents niveaux de ces transactions : niveau apparent et niveau caché).

De même les messages reçus des parents ou des figures parentales importantes, messages d’interdiction, de permission ou concernant la manière dont l’enfant devait se comporter pour être accepté pourront figurer avec économie en utilisant les mêmes schémas.

D’autres analystes transactionnels ont apporté leur pierre à la théorie, du vivant de Berne et depuis sa mort, presque chaque année, le prix scientifique Eric Berne est accordé à un Analyste Transactionnel. Ce fut le cas pour Karpmann qui décrit les jeux psychologiques au moyen d’un triangle avec à chaque pointe un des trois grands rôles correspondant à la place de chacun dans le jeu, celui de Victime, de Persécuteur et de Sauveur. Chacun entre dans le triangle par un rôle favori et ensuite, tout le monde tourne, comme on le verra plus bas En voici le schéma :

Ces quelques schémas de base suffisent. Ils contribuent à rendre l’A. T. plus accessible et en même temps ils peuvent être complexifiés par les spécialistes. Ils sont utilisables pour appuyer la description de la communication faite à partir d’une observation précise des paroles , des comportements et des mimiques des personnes et des résultats de leur action sur les autres.

Comment j’utilise l’A. T. dans mon métier :

L’Analyse transactionnelle s’utilise dans le domaine clinique, dans le champ social (métiers de soin et d’accompagnement) dans le domaine des organisations et dans celui de l’éducation. C’est de celui-ci que je parlerai puisque c’est celui où j’exerce mon métier.Je suis en effet inspectrice d’écoles et formatrice d’enseignants. Mon domaine est celui des apprentissages, ceux que font les enfants et ceux qu’on peut faire, devenu adulte

Dans mon domaine, l’A.T. me permet d’observer par exemple la relation pédagogique en situation d’inspection et de conseiller ce qu’il convientde faire, d’une manière qui pourra être acceptée. Je note les interactions entre un élève ou des élèves et l’instituteur, les mimiques, les paroles et lors de l’entretien qui suit l’observation de classe, nous partons de ces éléments pour analyser ce qui se passe et voir comment on peut faire autrement ou pourquoi c’était une intervention appropriée. Reproduire ce qui a bien fonctionné suppose en effet de comprendre ce qu’on a fait.

En voici une illustration : une institutrice m’avait demandé d’observer le climat de la classe dans le feuillet de préparation que je propose de remplir avant l’inspection et qui comprend une rubrique « que désirez -vous que j’observe en particulier ? » . (C’est la manière dont je mets en place des relations de type contractuel dans cette situation d’évaluation unilatérale). J’ai donc porté mon attention sur les relations entre les élèves et sur la manière dont l’institutrice intervenait. A un moment, deux enfants se sont disputées. On faisait du calcul mental et l’une avait copié son résultat sur l’autre. Cette dernière a protesté et dit « Maîtresse, elle a copié sur moi ! ». L’institutrice a répliqué : « Tu n’as qu’à cacher ton ardoise ! ». Un peu plus tard, au moment du comptage des points, celle qui avait copié s’est écriée : « Maîtresse elle a triché ! Là elle avait zéro !

Voici comment j’analyse cette petite scène en termes d’A.T.en utilisant le triangle dramatique, présenté dans le schéma numéro 2 :

La filllette A. se plaint de la fillette B. qui copie sur elle et contrevient à la règle non dite de travailler seul au moment de l’évaluation, ce qui était le cas. Elle demande à l’institutrice de réprimander celle qui n’a pas respecté la règle. Je suppose qu’elle se sent persécutée parce que l’autre lui vole son résultat et qu’elle veut la persécuter à son tour en la faisant réprimander. Elle doit attendre quelque chose comme : « Ce n’est pas bien de copier ! » . Elle fait appel au Parent de l’institutrice, celui qui fait la morale. L’institutrice qui se trouve sans arrêt devant ce type de situation la renvoie à sa responsabilité (elle n’a qu’à cacher son ardoise). Au lieu de se faire son alliée, elle la persécute, si bien que la fillette se retrouve Victime, puisqu’elle se voit reprocher de ne pas avoir fait quelque chose qu’elle aurait dû faire : cacher son ardoise et protéger son travail des regards de sa voisine.

Peu de temps après, sa voisine lance « Maîtresse elle a triché ! », se vengeant de la dénonciation, en position de Persécuteur, faisant alliance avec la maîtresse contre l’autre. Quand on entre dans le triangle dramatiqure, on y entre dans l’une des positions de Victime, de Persécuteur ou de Sauveur, mais on tourne dans le triangle. Les personnes en position de dépendance invitent les figures parentales à les sauver ou à les persécuter , souvent à les sauver en persécutant le voisin. Le triangle sert à marquer les rôles dans les jeux psychologiques. Ici, les fillettes et l’institutrice ont joué à un jeu psychologique qu’on nomme « Défauts », et qui consiste à signaler les défauts des autres, et la fillette qui copiait a enchaîné sur le jeu « Je te tiens ! » qui consiste à prendre l’autre sur le fait et à le crier bien fort. Tout cela se passe très vite et n’est pas conscient. La pratique de l’observation instrumentée avec les outils de l’A.T. m’a appris à identifier dans les échanges des formes fixes ( ici le jeu psychologique analysable avec le triangle dramatique) qui rendent la communication prévisible. A chaque étape, il est possible de trouver une intervention appropriée et de la proposer.

Que pouvait faire ici l’institutrice ? Elle pouvait rappeler le sens de l’activité, sans faire de morale et dire, en mobilisant la partie positive de son état du Moi Parent, quelque chose comme : « J’ai besoin de savoir si vous avez tous compris ou pas , avant de passer à autre chose. Quand tu regardes sur l’ardoise de ta voisine, tu n’apprends pas à trouver le résultat toute seule. C’est normal de se tromper, mais c’est important que tu apprennes à trouver le résultat toute seule. J’ai besoin de savoir si vous avez tous compris, car cela m’indique s’il faut y revenir ou non, car si je crois que tu as compris, je passe à autre chose et c’est toi qui es ennuyée ensuite ».

Le but de la plupart des enfants, c’est de faire plaisir à la maîtresse en donnant la réponse qu’elle attend pour laquelle ils obtiendront un sourire et des félicitations. Ils sont dans la dépendance par rapport aux grandes personnes et dans ce qu’on nomme en A.T. l’Enfant Adapté, face au Parent du maître qui lui dit ce qu’il doit faire. Or l’éducation vise à développer l’autonomie et la capacité de penser et se conduire par soi-même . Nourrir l’état du moi Adulte suppose de renoncer à faire deviner ce que l’on attend. En expliquant cela, l’institutrice agit sur les deux enfants et sur toute la classe. Elle contribue à créer un climat de coopération pour apprendre, en distinguant les moments où on vérifie les acquis et ceux où on travaille ensemble. Elle joue tantôt du Parent qui met en place les règles du groupe et les fait respecter, protège les enfants, mais aussi les nourrit affectivement et intellectuellement , tantôt de l’état du moi Adulte quand elle les entraîne à penser.

Moi-même, en m’appuyant sur l’observation de ce que je vois et j’entends, je travaille avec l’Adulte et j’aide l’enseignant à progresser, s’il le souhaite. La plupart d’entre eux sont stimulés par cet échange. Certains cependant évitent de s’engager dans une relation de type égalitaire avec l’inspecteur ou avec les enfants. C’est leur droit.

Le contrat en Analyse Transactionnelle

Je voudrais dire maintenant quelques mots du contrat. Faire de l’A. T., c’est expliciter. Or dans les métiers de l’éducation, les contrats ne sont pas explicites. A quoi nous engageons-nous ? Quelle est la réciprocité ? Les enseignants ont un contrat de travail avec l’institution qui les rémunère. Les parents ont un contrat avec l’institution qui a créé l’obligation scolaire et propose diverses modalités de formation. Mais les enfants sont obligés de venir à l’école. Certains sont motivés pour apprendre, d’autres non.

L’Analyste Transactionnel travaille sur contrat, dans une relation de réciprocité. Ce contrat n’est pas seulement financier (contrat d’affaire). Il concerne les buts que le client veut atteindre, ce qu’il veut changer ou apprendre ; il précise comment le client et l’Analyste transactionnel pourront vérifier que ces buts sont atteints. Le thérapeute partage ses outils théoriques et offre sa compétence. Il vérifie que le but désiré est légal. Il est lui-même soumis à des règles déontologiques, il est en supervision constante et appartient à une association qui forme ses membres et délivre les attestations d’exercer. Le contrat est protecteur et efficace parce que chacun met dans la relation l’énergie, la compétence et que la protection est assurée pour les deux, Analyste Transactionnel et client.

A l’école aussi , pour que le but de parvenir à l’autonomie et de réussir , qui est celui de l’éducation, soit atteint , il est important que les trois Etats du Moi des partenaires soient engagés dans la relation et que la responsabilité de chacun dans le résultat soit précisée.

Conclusion

L’A.T. est donc d’une grande utilité pour se comprendre, comprendre ses relations avec les autres, observer la communication et avoir un éventail de choix pour intervenir en fonction de la situation et du contrat qui lie les parties.Elle implique une double écoute de ce qu’on ressent et de ce qui se passe et qu’on fasse des hypothèses à chaud sur les processus relationnels en cours, en se fiant à son intuition et à son expérience pour intervenir avec bienveillance et efficacité.

Quels ouvrages consulter ?

Eric Berne : Analyse Transactionnelle et psychothérapie. Editions Payot
Gysa Jaoui : Le triple Moi . Editions Laffont
Fanita English : Analyse Transactionnelle et émotions, Editions EPI
Jacques Van de Graaf, Manette Krack, Salomon Nasielski : L’Analyse Transactionnelle, Méthodes d’application en travail social et en psychologie clinique.. Editions Privat

Agnès Le Guernic est Analyste Transactionnelle certifiée par l’association européenne d’Analyse Transactionnelle, dans le champ de l’éducation. Elle a exercé comme inspectrice et comme formatrice d’enseignants dans le domaine de la communication. Elle est formatrice et superviseur agréée par l ’ association européenne d ’ AT depuis 2002. Elle exerce à Paris.

Cet article a été publié dans le numéro de janvier-février 1994 du magazine INTUITIONS

L’OKness et les enseignants

Auteur : Nicole Pierre T.S.T.A.E.

Je travaille avec des enseignants qui, parfois, devant les difficultés de leur métier, s’interrogent sur l’OKness.

Dans « Que dites-vous après avoir dit bonjour » Berne parle du sentiment d’Okness et de sentiment de non-Okness. La traduction réductrice « être quelqu’un de bien » et « ne pas être quelqu’un de bien », a un aspect moralisateur propre à dérouter l’enseignant. Je préfère la proposition de Gysa Jaoui de parler de philosophie de la pratique .

Dans cet article, je partirai d’un témoignage d’un professeur d’anglais en collège, Nadine, pour vous faire part de mes réflexions sur l’OKness et les enseignants.

Nadine arrive dans un nouvel établissement, après un déménagement.

« Là bas, c’était très facile. J’étais habituée à ce qu’on encense tout ce que je faisais. Je pensais qu’en arrivant avec « une haute technicité », tout se passerait au mieux et j’ai trouvé des élèves très faibles, au comportement difficile. Alors, j’ai crié pendant deux semaines et eux continuaient à semer le bazar. J’avais mal à l’estomac, je tremblais en sortant de cours. Même les parents s’y sont mis. Là bas, je n’utilisais pas le livre et les parents ne disaient rien. Te rends tu compte ! Ici, ils m’ont demandé quelle méthode j’utilisais et quels étaient mes objectifs ! A tous points de vue, je me sentais en insécurité : une nouvelle maison, un nouveau collège, le stress… j’ai même cassé ma voiture ! J’étais intellectuellement préparée mais… »

Que s’est-il passé ? De la position +/+, dans son ancien établissement, Nadine passe successivement en +/-, puis en -/-. Pendant un temps, elle n’a pas trouvé les moyens de s’adapter à un cadre nouveau et a perdu confiance dans ses capacités. En se reconnaissant tout d’abord impuissante dans ce contexte, elle a su ensuite élargir son cadre de référence, se centrer sur l’élève, lâcher ses exigences, repenser son enseignement et retrouver sa puissance.

Il est important de reconnaître que l’enseignant doit tenir compte de deux paramètres : la relation à l’élève et la transmission du savoir. L’enseignement, c’est une relation où quelqu’un enseigne à quelqu’un d’autre qui est là pour apprendre. Le lien entre l’enseignant qui donne le savoir et l’enseigné qui reçoit, est la relation, sans laquelle, la transmission du savoir ne peut se faire avec partage d’énergie.

Si l’analyse transactionnelle donne à l’enseignant des outils pour gérer sa classe avec Protection (le contrat), Permission ( de fonctionner différemment, de lâcher les illusions, la toute puissance ), pour enseigner dans une Puissance partagée, il n’en reste pas moins la réalité avec ses difficultés liées aux problèmes de niveaux, de discipline, de milieux, de cultures différents etc … L’OKness de l’enseignant est en lien avec sa capacité à gérer ces problèmes, à trouver les moyens de remplir sa mission et nécessite … beaucoup d’énergie.

Je pense à une amie qui enseigne en « zone sensible », parce que, dit-elle , « je crois que je les comprends , c’est pas des mauvais garçons, et pourtant, souvent, je me demande comment faire pour les accrocher ! »…

En quoi va consister le sentiment d’OKness pour les enseignants ?

« La vie est précieuse. Tout être humain a de la valeur, est important et doit être pris en pleine considération » rappelle Nancy Porter

L’OKness par rapport à l’apprenant, c’est prendre la personne là où elle en est, comme le préconise Peg Blackstone : « Pour établir une relation ‘je suis OK-tu es OK’, pleine de sécurité, il est vital que non seulement le thérapeute [ ou l’enseignant] considère la personne avec cette clarté et cette sympathie mais aussi que celle-ci apprenne à se voir elle-même de cet œil positif. »

C’est aussi considérer l’enseignement avec la notion de James Allen « la sensibilité constructionniste » qui déplace le centre d’intérêt vers le présent et vers les possibilités futures, plutôt que vers le passé et vers les manques avec accents sur les points forts et les possibilités.

Je veux rendre hommage aux enseignants qui arrivent à gérer la relation à l’élève en utilisant l’analyse transactionnelle, qui savent recadrer, qui tentent de pratiquer ce qu’on pourrait appeler « un parentage OK » , qui partent de ce que les élèves savent et pour qui l’école est avant tout un lieu de contact, de relation, de socialisation, de vie, comme en témoigne Annie : « Je ne suis pas pressée de partir en retraite. J’aime bien être avec mes élèves. Oh, ce n’est pas toujours facile ! Quand je pense à ma classe de 5°, cette année …, ils sont bien faibles mais je me sens bien avec eux et je crois qu’eux aussi sont bien avec moi. »

Est-ce cela le sentiment d’OKness ?

Bibliographie

BERNE E., Que dites-vous après avoir dit bonjour ? » Ed. Tchou, pp.76-77 .
JAOUI G., Accusation dérive sectaire, AAT n°110, p. 64.
Porter, N., Que signifie « Je suis OK – Tu es OK », p 27, ( orig. TAJ, 1981), AAT n° 21, p 26 -28 .
Blackstone, P., l’Enfant dynamique : intégration de la structure de second ordre, des relations d’objet et de la psychologie du soi, p 140, (orig. TAJ, 1975, 1993), AAT n°92, p.125-142.
Allen, J et B, Un nouveau type d’analyse transactionnelle : une version du travail sur le scénario à partir d’une sensibilité constructionniste ( orig. TAJ, 1997) AAT n° 93,p 7-18.
Voir le conte de Von Varga, G., Des princes ….ou des principes, AAT n° 20, p 171-174, à partir duquel j’invite les enseignants à réfléchir sur leur fonction .

Les aides à la réussite scolaire

Auteur : Nicole PIERRE – TSTA

Les enfants, les adolescents qui « décrochent » en classe sont-ils des enfants qui n’ont pas d’intérêt, qui sont apathiques, qui s’ennuient, ou des enfants qui sont sous tension, toujours agités, qui font des erreurs, des étourderies, qui ont des problèmes de mémoire ? Est ce que ce sont des enfants non motivés ou des « élèves en difficulté » ?

Qu’est-ce qu’un enfant en difficulté ?

Comme le dit très bien François Marchand (cf Le Journal des Psychologues – Avril 96 – n° 136), c’est très souvent celui qui a mûri plus lentement que les autres et qui toutefois doit comme les autres apprendre selon les normes, l’âge, le programme, etc…

C’est aussi celui qui se dévalorise, qui peut-être n’a pas été stimulé dans ses tentatives antérieures ou qui, lors d’expériences, a connu un sentiment désagréable comme la honte qui maintenant l’inhibe.

A-t-on des solutions pour aider ces enfants, ces jeunes qui présentent des troubles de l’apprentissage ou du comportement ?

Certes, l’élève en difficulté a besoin qu’on l’aide. Mais aider ce n’est pas le rendre dépendant. Aider c’est le remettre sur les rails, en lui faisant prendre conscience de ses ressources, en lui montrant comment les utiliser, en évacuant ses « ancrages » négatifs et c’est l’« accompagner » dans ses actions en le rendant responsable.

L’élève en difficulté nécessite plus d’attention et nous avons besoin d’avoir une trousse à outils pleine, compte tenu de la diversité, de la complexité de l’individu, si nous voulons repérer les blocages et les éliminer. Le rôle de l’enseignant ou du consultant en éducation est d’accompagner le jeune, de l’aider à apprendre, à changer, à fonctionner selon ses critères dans un grand respect de sa personne.

I – Des outils pour comprendre et accompagner un enfant en difficulté.

Je suis avant tout une praticienne avec une longue expérience en milieu scolaire, donc en groupe, et en individuel ; j’ai constaté qu’un travail centré sur les problèmes de l’enfant l’amène à retrouver de l’intérêt pour l’école et le goût de l’apprentissage. Je propose quelques réflexions issues de ma pratique.

Ma référence de base est l’Analyse Transactionnelle . Elle me permet de comprendre les comportements des jeunes, de faire des diagnostics sur les causes des difficultés, de trouver des remédiations, d’intervenir sur une base contractuelle, en respectant les limites de mes actions dans le champ éducatif, dans l’ici et maintenant.

Les autres outils se réfèrent principalement à la Gestion Mentale , à la P.N .L. , aux travaux de Carl Rogers et Thomas Gordon :

  • La Gestion Mentale comme capacité à gérer des ressources intellectuelles permet d’apprendre à apprendre
  • La P.N .L. offre un éventail d’outils pour l’observation et la prise en compte du comportement extérieur de l’individu.
  • Les techniques de communication de Carl Rogers et Thomas Gordon aident dans l’entretien.

D’autres approches comme le yoga , la sophrologie, la visualisation , adaptées à l’école, permettent de « recentrer » l’enfant et de le mettre dans des conditions favorables à l’apprentissage.

Parmi les besoins fondamentaux (cf. la Pyramide de Maslow), ceux que les enfants doivent satisfaire pour pouvoir apprendre sont :

  • les besoins de sécurité, pour pouvoir ensuite créer des liens et se reconnaître membre d’un groupe,
  • les besoins d’appartenance, d’amour, avec les permissions de ressentir et d’exprimer ses sentiments, de ne pas être d’accord, de faire des erreurs, d’être différent, avant d’accéder au niveau suivant,
  • les besoins d’estime de soi, avoir confiance en soi, se reconnaître comme estimable, être reconnu pour ses compétences.
  • enfin, les besoins d’auto-réalisation qui vont permettre d’accéder un jour à l’autonomie.

Les outils de l’Analyse Transactionnelle permettent de travailler sur la satisfaction de ces besoins.

II – Un processus d’apprentissage.

1 – Prendre conscience des modes d’apprentissage.

Une étape très importante pour l’enfant en difficulté, c’est la prise de conscience de ses divers processus mentaux, des différentes formes d’évocation mentale qui lui permettent de faire attention, mémoriser, comprendre, réfléchir, imaginer et par conséquent de développer la confiance en soi.

 » La gestion mentale en responsabilisant l’élève lui procure les moyens de conquérir son autonomie pédagogique… . Il a enfin les moyens de se prendre en charge et il apprend ce qu’il doit faire pour réussir «  ( A. de La Garanderie )

Les aptitudes scolaires sont classées dans différents domaines :

  • de la gestion du quotidien (choses – êtres -scènes – gestes),
  • des apprentissages mécaniques de base, des automatismes (le « par cœur »),
  • des opérations complexes : l’analogie, la déduction, l’induction,
  • de la créativité, de l’imaginaire.

2 – Quitter les préjugés et les illusions.

Les outils de l’Analyse transactionnelle, conjugués à la Gestion Mentale , aident à comprendre puis à accompagner l’enfant pour résoudre ses problèmes ; par exemple :

  • s’il s’agit de préjugés : « Dans ma famille, on est nuls en maths… forcément je ne comprends pas »
  • s’il s’agit d’illusions : quand l’élève sait parfaitement ses leçons mais ne peut répondre à une question qui s’y réfère : « Si je sais ma leçon par cœur, je réussirai » pense t-il, alors que le professeur se dit : « Il récite par cœur et ne comprend rien ».

3 – Reconnaître les compétences de l’enfant.

Aider ce n’est pas « faire à la place »

Souvent, si l’enfant fait appel à la compétence de quelqu’un d’autre, c’est qu’il ne tient pas compte du fait qu’il a la capacité. Cette dévalorisation a été encouragée par l’éducation , l’enfant n’a pas été stimulé pour faire des essais, des erreurs, on ne lui a pas fait confiance.

Si on lui apprend qu’il peut recevoir des signes de reconnaissance à tout moment, il va être nourri, il va être valorisé pour tous les efforts qu’il faits, il va constater que la réussite fait du bien.

4 – Apporter une remédiation au processus scénarique.

Mais que faire avec un enfant qui semble complètement inhibé ?

D’où vient cette inhibition ?

Peut-être un jour, s’est-on moqué de lui, lui a-t-on fait honte ; alors il s’est forgé la certitude qu’il n’est pas capable, que les autres, eux, sont plus intelligents que lui, et que le niveau de la classe est beaucoup trop élevé, alors il renforce ses croyances de souvenirs désagréables d’échecs, de vexations, qui vont conforter ses idées.

La crainte de revivre de tels moments peut provoquer des manifestations physiques comme des douleurs (mal au ventre, nausées….), au moment d’aller à l’école. En classe, c’est le blocage, l’enfant, tendu et défensif, ne peut plus penser.

Le « système de scénario », concept développé par Richard Erskine et Marilyn Zalcman explique tous ces symptômes qui engendrent les dysfonctionnements scolaires et permet d’y remédier. Après avoir clarifié comment l’enfant met en oeuvre ses décisions anciennes, on peut reconstruire un nouveau circuit, positif, à partir de ce qu’il est capable de faire , puis l’amener à prendre de nouvelles décisions .

III – Quelques idées d’accompagnement

Que peut-on proposer aux élèves qui « décrochent » pour les aider à se reconstruire ?

Comment pouvons nous en classe préserver ce que Philippe Meirieu appelle « l’espace de sécurité » ? « L’école échoue encore plus sur la prise de parole que sur écrire. », a-t-il dit.

Voici quelques suggestions :

  • L’entretien pédagogique , c’est une phase spécifique de la gestion mentale : des questions précises permettent de repérer la structure mentale de l’enfant pour l’aider ensuite à intégrer des contenus.
  • Le contrat de réussite individuelle ou d’amélioration de comportement . C’est un tremplin pour responsabiliser le jeune puisqu’à partir de la situation présente, il décrit son objectif puis les moyens qu’il mettra en œuvre pour l’atteindre et les obstacles qu’il peut rencontrer. Cette forme de contrat le rend acteur de sa réussite.
  • Des séances de méthodologie pour parler avec les enfants en fonction de leurs difficultés, de la façon de réviser un contrôle, d’apprendre une leçon…
  • Des séances de régulation (technique d’animation de groupe) au cours desquelles les élèves apprennent à exprimer leurs sentiments, leurs émotions dans un contexte protecteur ( avec des règles strictes : confidentialité, pas de jugement etc…).

Ce sont des séquences où la parole circule, où le jeune décide de ses propres choix de ses propres options parce qu’il se sent écouté et accepté.

Conclusion

Améliorer la communication avec l’élève, c’est l’aider à trouver sa motivation, à améliorer son travail puisqu’il se sent reconnu avec ses différences et reçoit les compliments appropriés qui l’énergétisent selon qu’il a besoin d’être accepté pour ce qu’il fait et pour ce qu’il est.

C’est la satisfaction du besoin de reconnaissance qui permet d’établir une image positive de soi.
« Traitez les gens comme s’ils étaient ce qu’ils pourraient être
et vous les aiderez à devenir ce qu’ils sont capables d’être »
Goethe

Nicole PIERRE est analyste transactionnelle, T.S.T.A.E., consultante en éducation (spécialiste en Gestion Mentale, praticienne en P.N.L. )

Elle forme des consultants en éducation intervenant auprès de jeunes en difficulté : enseignants, éducateurs, parents…

Bibliographie

ROGERS, Carl , Le développement de la personne (Dunod ).

Actualités en Analyse Transactionnelle : Les Editions d’analyse transactionnelle – 2 rue de l’Oratoire 69300 – Caluire

De la GARANDERIE , Antoine, Comprendre et imaginer , Le Centurion)

De la GARANDERIE , Antoine, Les Profils pédagogiques , (Le Centurion)

De la GARANDERIE , Antoine , TINGRY , Elisabeth, On peut tous toujours réussir (Bayard).

THIRY, Alain, LELLOUCHE, Yves, Apprendre à apprendre avec la PNL , (De Boeck)

PIERRE, Nicole, Pratique de l’analyse transactionnelle dans la classe avec des jeunes et dans les groupes, (ESF), p 70-76

ROGERS, Carl, Le développement de la personne , (Dunod)

GORDON, Thomas, Enseignants efficaces , (Le Jour)

FLACK, Micheline, De COULON, Jacques, D es enfants qui réussissent (Epi)

CAVALLIER François J. Paul, Visualisation (Inter Edition).

BERNE, Eric, Des jeux et des hommes , (Stock)

STEINER Claude, « L’économie de caresses » C.A.T., 1, p 98

Cité, n. 5. , p 87-91

ERSKINE, Richard, ZALCMAN, MARILYN , « Le circuit du sentiment parasite », C.A.T., 1, p 187

Cité, n. 5. , p 97-102

MEIRIEU , Philippe , Enseigner, scénario pour un métier nouveau (E.S.F.)

Cité, n. 5. , p 94-96

Cité, n. 5. , p 64-66

Cité, n. 5. , p 77-79

Cité, n. 5. , p 92-93